Les peurs voraces et tenaces

 


   Les peurs voraces et tenaces



J'écris à cette heure tardive car j'ai des peurs chevillées au corps.

Comme la peur de la chute en Aïkido.

Cette peur est reliée à celle de tomber en arrière, de ne pas avoir un terrain d'atterrissage favorable au moment du choc, de l'impact ou encore au vertige.

Les peurs sont voraces et tenaces. Quand rien n'éclaire tout s'éclaire d'un vif éclair avant la retombée de l'obscurité des doutes et des angoisses.

Ce n'est pas tant la honte de tomber ou de se vautrer qui est gênante, ça, c'est une question de dignité et de relation à sa fierté personnelle. Ce n'est malheureusement pas un problème de mon ressort ou lié à mon histoire.

Ce qui me dérange et démange dans cette peur de la chute, c'est l'espace du mouvement de la tombée du corps à terre. La réception au sol pour la chute en avant (comme en arrière).

Les chutes se ressemblent toutes dans les arts martiaux puisqu'avec notre corps, il n'existe pas mille façons de tomber et de se réceptionner sans se faire mal. Seulement quelques unes très efficaces quel que soit le terrain. Même si des terrains sont plus favorables à la chute que d'autres : une question de contexte ?


Si je devais parler de la Chute dans les religions (ou autres) ou bien les chutes en lien avec les voyages de la conscience, je l'aborderais encore différemment. Ou encore la chute des cascades, celle de la pluie, de la neige, de pierres ou de glace... Elle existe avec tant de formes !

La peur est irrationnelle par nature. Elle est une protection face à un danger car elle agit comme un signalement. Elle alerte nos sens. Et elle n'a aucun sens.

Paradoxalement, la chute a un sens. Non seulement quand nous tombons mais quand nous nous relevons aussi. Quand elle est bien effectuée, une chute n'est pas seulement un mouvement descendant mais aussi ascendant. Dans le positionnement des pieds vers le Ciel pour la chute arrière par exemple. Ou dans le fait de se relever après la chute en avant.

Revenons à cet espace qui me dérange et démange mon inspiration à m'en empêcher de dormir. Cette sensation de vide, d'être dans un laps de temps hors du temps pour ne serait-ce que quelques minuscules secondes avant ce lien avec la Terre (ou le tatamis). 

Cet espace qui me fait peur est indéfinissable puisqu'éphémère et jamais au même endroit. Ce laisser aller en arrière demande confiance et courage. Mine de rien, c'est dans la simplicité des gestes que se trouvent leur complexité. Notamment dans leur signification et leur symbolique respectives. 

Cette subtilité dans ma peur ne s'explique pas par la raison, ni forcément par un besoin de lâcher prise et de laisser couler les énergies comme ça... 

La chute juste ou la juste chute est celle en accord avec son corps. Dans la foi en ses propres capacités. Et comme en ce moment, je n'arrive pas à reconnaître ma grandeur intérieure, comment pourrais-je accepter de chuter sans rien voir de mon atterrissage ?

Finalement cette peur est liée à la difficulté de vivre sans certitude chaque jour, en se laissant glisser dans la mouvement pour se réceptionner avec l'intelligence du corps entraîné. 

La peur crispe, contraint. Elle alimente les tensions internes. Elle dévore l'espoir et la foi. La peur se personnifie et devient, en les englobant toutes, la peur de qui nous sommes en tant qu'humains mais surtout au-delà. 

J'ai aussi peur car des mots restent bloqués dans ma gorge. J'ai des choses à transmettre mais les mots ne franchissent pas mes lèvres. Et parfois mon courage manque à mes ambitions qui se réduisent au silence. Comme pour le voyage au Portugal que je rêve de faire. La peur de la chute. La peur de se dévoiler aussi.

Si je dis qui je suis, de ma perception de la vie, vais-je être critiquée et mal interprétée, adulée ou déchirée devant l'indifférence ? Ou bien vais-je avoir une attention sincère de ce que j'ai à affirmer à certaines personnes visées et avisées ?

La peur de la chute et la peur de se dévoiler ont d'un commun accord retrouver mes accords désordonnés à l'intérieur de mon chaos déchiré. C'est un espace d'incertitude face à la réception : de moi, des autres, de la société... La réception au sol mais pas que ! La peur de la chute a bien d'autres dimensions et distorsions. Et le lien avec la levée du voile dans le fait de se confier est l'incertitude de l'accueil. 

Dans le langage courant, l'accueil et la réception sont synonymes. Et vous retrouvez cet aspect dans de nombreux lieux. 

Derrière mes peurs se cachent donc la peur de la réception comme si j'espérais une rédemption. Un pardon. Après mes confessions.

C'est si facile d'écrire à mes yeux et pourtant... l'oral n'est pas banal.

De quoi avoir peur ? De mes perceptions ? Non... 

Pour avancer, la réception au sol a besoin d'être au plus juste. Le positionnement du corps est essentiel.

Pour avancer, la réception dans la communication doit être au plus juste. Avec sincérité, honnêteté et dextérité, trouver avec justesse les mots adéquats. La posture intérieure est essentielle.

La chute est celle qui marque la fin du combat. Elle symbolise autant la mort que la vie, telle un Phénix. Puisque nous nous relevons à chaque fois. La chute a aussi un mouvement cyclique et en même temps, elle est complètement en désordre. Elle est ronde aussi quand vous savez où regarder. Elle est mécanique et dans la souplesse de son adresse. Je parle de l'adresse comme celle de l'archer entre sa cible et ses flèches, dans la justesse de son geste. Avec la puissance suffisante et le regard posé au bon endroit.

Or, dans la chute, le mouvement est permanent. Et si le partenaire agit trop rapidement, l'atterrissage peut être violent. Je préfère y aller doucement. Maîtriser son attention dans l'incertitude est aussi une autre histoire...

J'ai encore beaucoup à apprendre dans cette relation à la chute pour avoir le courage de continuer à me perfectionner et apprendre cet accueil de la réception du mouvement.

La chute comme la pluie atterrit à un endroit bien précis. A moi de continuer sur cette voie.

Ecrire m'a permis d'éclaircir l'obscurité de mes peurs. Explorer cela me demande d'être déterminée. 

Et d'essayer de la partager, qu'importe la réception de cet article sans chute. 

Et pourtant, là, je me suis dévoilée. Voyez comme l'irrationnel danse même dans les gestes du quotidien ou ceux, répétés inlassablement sur un tatamis. Car rien n'est jamais fini. Et la chute s'apprivoise autant qu'elle reste sauvage. 

Pour l'instant, le voile se dévoile avec lenteur et frayeur, alors qu'il ne demande que délicatesse et douceur pour une chute aussi surprenante que non savante. 

La chute marque la fin autant qu'un autre début alors... chut ! (Le spectacle va commencer ou continuer, c'est à toi de décider où tu en es). Et si tu es au moment de la chute, pense à te relever. ;) 


 Charline, votre petit mage de la Nature qui se faufile au fil des péripéties de la Vie. ;) 




Commentaires

  1. Ce qu'on apprend, je crois c'est... plusieurs choses 🍉 d'abord la distance entre soi et le sol, assez importante notion qui évite de perdre de vue la réalité, ahah. Ensuite le réflexe d'attention car en effet oui la chute peut bien arriver un peu malgre soi si Tori est peu adroit. Distance entre soi et l'autre. Et enfin, la capacité de réaction. Bonne chute !

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  2. La chute qui sauve du choc... Excellente analyse, Martialus

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